dimanche 18 avril 2010

Les aventures extraordinaires d'Adèle Blanc-Sec

Paris à la Belle époque, 1912. Adèle Blanc-Sec, une jeune journaliste aventureuse, effectue un voyage en Egypte afin de trouver une momie qui sera capable de guérir sa soeur malade. Au même moment, un ptérodactyle vieux de plusieurs centaines de millions d'années éclot dans le jardin des Plantes. Revenue dans la capitale, Adèle Blanc-Sec va donc tenter de faire une pierre deux coups en résolvant ces deux affaires, tout en ne perdant pas son objectif principal.
Luc Besson était un réalisateur en voie de disparition. Scénariste de gros nanars en cette dernière décennie (Le transporteur, Banlieue 13...) et réalisateur d'Arthur chez Jardiland dans une 3D bien laide, Besson n'était plus devenu que l'ombre de lui-même à des années lumières de ces films cultes qui avaient doré sa réputation. On repense par exemple au poétique Grand Bleu, ou encore au violent Léon. Mais que ses fans se rassurent, avec son nouveau long-métrage, Luc Besson revient en grande pompe et plus inspiré que jamais ! Adèle Blanc-Sec est à la base une Bande Dessinée né du fruit de l'imagination de Tardi. Besson aura mis près de six ans pour convaincre le monsieur d'adapter son oeuvre, et ce privilège accordé, on voit bien que le réalisateur a cuisiné aux petits oignons son film, qui rehausse littéralement la valeur du cinéma français. Toute la mise en scène est digne d'un film américain : les costumes sont flamboyants, les décors vertigineux (le Paris de 1912, insouciant et féerique, renaît derrière la caméra) et les acteurs s'en donnent tous à coeur joie, à commencer par son interprète principal, Louise Bourgoin, ex miss-météo de Canal +. Le moins que l'on puisse dire, c'est qu'à la manière de Jeunet qui avait accordé le premier grand rôle à Audrey Tautou avec Amélie Poulain, Besson a suivi cette même (et bonne) intuition. Bourgoin campe une Adèle Blanc-Sec hilarante et toujours cynique, aux airs complices. Elle incarne un petit bout de femme qui secoue ce petit monde dominé par la gent masculine en ce début du siècle et ainsi, c'est cette indépendance qui la rend forte à nos yeux, sa mysanthropie qui la rend paradoxalement attachante.

A chaque minute qui s'écoule, on ne se rend pas véritablement compte que le temps passe (trop) vite. Ce monde est si riche que le spectateur ne demande qu'à connaître tout les petits secrets de la capitale, et qui confèrent donc à Paris (une fois de plus) le titre de ville si mystérieuse qu'une momie se baladant en smoking dans les rues ne choquerait plus grand monde. C'est un fait : Besson a su tirer parti des bulles de la Bande Dessinée pour en faire un dessin grandeur nature, vivant, jubilatoire et parsemé d'aventures farfelues en tout genre qui n'ont rien à envier à celles d'Indiana Jones. De bout en bout, le spectacle est magnifique et le rythme, effréné. On reste déçu que la salle se rallume à la fin, et surtout on reste très surpris d'avoir autant adhérer à un univers en l'espace de si peu de temps (1h47) ! Adèle Blanc-Sec a déjà été adopté de manière intrasèque (ainsi que les autres personnages, tous aussi truculents les uns que les autres), et on attend avec grande impatience les deux prochains volets qui, succès oblige, se verront sur la toile bien assez tôt. Grâce à ses clins d'oeil à l'univers d'Hergé, le film est à voir aussi comme un hommage au neuvième art. Certaines scènes ne s'inscrivent pas toujours dans la logique, mais l'humour détonne à chaque fois (le passage d'Adèle en prison est un moment purement jouissif). Ainsi, en y apportant sa touche personnelle, Besson a su aller au-delà des conventions en construisant son propre story-board, dans un schéma non classique et qui intègre flash-blacks audacieux à une narration-off des plus bienvenues. Le résultat est comparable à celui d'une potion magique : les ingrédients sont si bien dosés qu'en y buvant une goutte, on ne peut que fondre devant ce mariage presque parfait de l'action et de l'aventure.
En conclusion, Besson "is back" et une star "is born" : deux arguments de taille pour créer le bouche à oreille, et convaincre les plus réticents qu'en allant voir ce film, ils pourront assister à du vrai cinéma français comme on en est fier. Pour les autres qui auront pleinement profiter de cette occasion si rare dans nos salles de l'Héxagone, ils pourront calmer leur impatience en se tournant vers les BD pour connaître la suite des aventures.