mercredi 29 juillet 2009

Là-haut - critique-

Quand Carl, un grincheux de 78 ans, décide de réaliser son rêve de sa vie en attachant des milliers de ballons à sa maison pour s'envoler vers l'Amérique du Sud, il ne s'attendait pas à embarquer avec lui Russell, un jeune explorateur scoot de 9 ans, toujours très enthousiaste et assez envahissant... Ce duo totalement imprévisible et improbable va vivre une aventure délirante qui les plongera dans un voyage dépassant l'imagination...
Après Ratatouille (2007) et Wall-E (2008), Pixar devait placer la barre très haut pour nous faire encore rêver. C'est sans mal et presque sans surprise qu'il réussit encore une fois son pari avec Là-haut, véritable toile irisée à caser dans les bijoux des films d'animation. La claque devient à chaque fois de plus en plus monumentale : ici ce sont des couleurs, un rendu des cheveux, des expressions faciales, des décors pratiquement réels qui viennent confiner l'animation dans le cinéma de ce qu'il y a de plus septième art. Le choix d'avoir mis en avant deux êtres humains diamétralement opposés dans l'âge atteint dans l'émotion toutes les générations. Ça part d'une introduction très émouvante sur la vie d'un homme, qui fut jadis plein de vie, pour aboutir au développement sur un vieillard morose qui voit dans le voyage un moyen de retrouver sa cure de jouvence. Son camarade de jeu, Russell, voit la vie en rose (ou peut-être tout simplement à travers les yeux innocents d'un enfant), qui voit le bien partout. Et c'est ce baume là qui vient imbiber notre petit coeur, à travers des aventures gonflées aussi spectaculaires qu'incontestablement réussies en tout point dans ses trouvailles.
Ce qui est formidable aussi avec Pixar, c'est cette magie inépuisable dont ils font preuve, cette volonté de vouloir raccorder les séquences dramatiques avec l'humour, par le biais de leur imagination qu'ils arrivent parfaitement à retranscrire. Ce mariage sied à merveille Là-haut dans cette combinaison jamais lourde ni pompeuse mais toujours d'une fluidité remarquable. On s'attache aux personnages dès leur premier sourire, et on a du mal à s'en séparer passé le générique de fin. Là-haut se veut comme une ode à la vie, plein d'entrain, de beauté et d'humanité, qui démontre toute la légèreté de l'être. Là-Haut ou un cadeau tombé du ciel en cet été 2009 qui ravira tout le monde, et qui donnera l'envie de brasser l'air pour partir vers de nouvelles aventures.

lundi 27 juillet 2009

La Dame à la Licorne de Tracy Chevalier - critique -

Désireux d'orner les murs de sa nouvelle demeure parisienne, le noble Jean Le Viste commande une série de six tapisseries à Nicolas des Innocents, miniaturiste renommé à la cour du roi de France, Charles VIII. L'artiste accepte et s'éprend de l'une des filles de Jean Le Viste, Claude, qui l'entraînera dans le labyrinthe de relations délicates.
Une plongée dans le Paris du XVe siècle. Tracy Chevalier imagine l'histoire des six célèbres tapisseries de La Dame à la Licorne (exposées au musée national du Moyen-Âge dans le Ve arrondissement de Paris). Ces tapisseries, à l'aura quelque peu magique, dégagent beaucoup de coloris et une sensation de repos en les visionnant. Tout comme le livre d'ailleurs et la manière de Chevalier de créer une fiction comme elle aurait pu être la véritable histoire. Perturbé au départ par le choix de Chevalier d'avoir intégré une kyrielle de narrateurs pour raconter, le lecteur est pris au jeu au bout de quelques pages. Toute l'originalité de l'oeuvre repose en effet dans le fait d'avoir voulu mettre en scène cette romance à travers les yeux de plusieurs personnages qui y jouent un rôle bien précis. Cela nous permet de nous mettre dans leur intimité, leurs pensées que personne d'autre ne peut entendre, et ce n'est avec aucun mal que l'on passe d'un personnage à l'autre. Nous sommes donc parfois amenés à revivre une même scenette mais à travers deux points de vue différents. De plus, chaque personnage a sa propre singularité. C'est décidément un véritable talent chez elle : ce pouvoir qu'elle a de tisser un lien entre ses personnages et nous, nous donnant ainsi presque l'impression de vouloir intervenir dans leurs affaires. Elle illumine une fois de plus, comme une marque de fabrique, son roman par un couple qui s'oppose : la noble Claude et l'artiste Nicolas. Amoureux mais ne pouvant défier le protocole, le roman vire parfois à la tragédie, entre compassion pour les gentils et haine envers les méchants. Les plus jeunes paraissent impuissants face aux plus âgés et ce sera ici l'expérience qui, malheureusement, triomphera. Pour ce qu'il s'agit des tableaux, ils prennent vie devant nos yeux. On suit leurs naissances et leurs évolutions à travers les croquis, les peintures, les tissages de ces derniers. Six tapisseries qui représentent les cinq sens de l'être humain et un sixième sens nommé A mon seul désir. Chaque sens possède son histoire et chaque détail n'est pas en reste. L'imagination de Chevalier n'a pas de limite et c'est d'autant plus troublant que son récit prend une tournure des plus plausibles. On ne pourra pas ne plus penser à cet univers magique qu'elle a su créer en regardant les dites-tapisseries.
Sur fond d'amours contrariés, de jalousies éparses, de trahisons et de scandales, de multiples labeurs et de souffrances, La Dame à la Licorne est une belle tapisserie à elle-même, reconstituant le XVe siècle français avec beaucoup de précision. On sent la documentation derrière qui fut indispensable pour apporter de la véracité et le résultat est là. Toujours déçu par ce que j'appelle dorénavant le syndrome Chevalier (du fait que ses romans soient toujours trop courts), on ferme le livre, la dernière page lue, l'esprit quelque peu éclairé. Autant de soin apporté pour une oeuvre ne peut que nous rendre béat devant un auteur à surveiller de très près.

samedi 25 juillet 2009

Alice au pays des merveilles de Lewis Carroll - critique -

Alors qu'Alice, une petite fille aristocrate, se faisait faire la lecture par sa grande soeur, elle voit un Lapin Blanc courir très hâtivement. En le suivant, elle finit par déboucher sur un terrier. Elle trébuche, tombe à l'intérieur et la voilà découvrant un nouveau monde, le pays des merveilles, peuplé de personnages tous plus fous les uns que les autres...
De ce que nous pourrions citer Maupassant comme un auteur qui marqua la littérature française du XIXe siècle, nous pourrions citer Lewis Carroll comme un auteur qui marqua l'Angleterre en 1865. Et de ce qui pourrait se comparer à une oeuvre enfantine n'en ai au final pas une du tout. A travers des satires, des distorsions de logiques incessantes et des interrogations métaphysiques, Alice au pays des merveilles est une oeuvre philosophique difficile d'accès et emprunte de folie. Tellement de choses à dire sur cet univers foisonnant que je n'en délivrerai quelques axes principaux.
Très courte, l'oeuvre dégage néanmoins à chaque page un parfum très étrange car elle ne répond à aucune rationalité. Alice satisfait sa curiosité, un vrai défaut ici, en suivant le Lapin Blanc qui semble débouler devant ses yeux comme un attrait de la normalité. D'ailleurs, ce n'est pas le gilet élégant que porte le Lapin qui choque Alice mais le fait qu'il sorte une montre de sa poche pour en vérifier l'heure. Nous percevons donc d'ores et déjà qu'Alice s'apparente à une petite fille qui prendrait ses rêves pour des réalités mais à aucun moment nous ne connaîtrons son âge. D'autant plus qu'à mesure qu'elle s'aventurera dans le pays des merveilles, nous aurons l'impression que ce voyage en quête de son identité la fera grandir en maturité. Car trouble identitaire, l'oeuvre en regorge. C'est Alice, bien sûr, qui se pose des questions sur elle-même. Ses nombreuses interrogations et monologues intérieurs la décrivent comme un personnage aux multiples personnalités qui a tendance à oublier son vrai "soi" au détriment de plusieurs "autres" (le passage où elle boit le flacon pour entrer dans la porte). C'est pourquoi elle ne cesse de grandir et de rapetisser ; et le fait que le Lapin Blanc la prenne pour Marianne lui fera le temps d'un instant comprendre qui elle est véritablement. Alice, c'est aussi une petite fille qui est obsédée par l'image qu'elle reflète aux autres et ne manque jamais une occasion de montrer ses bonnes manières, face au Dodo et au Griffon notamment, mais aussi face au Chapelier toqué dont elle ne cesse de souligner sa grossièreté. C'est comme si entrant dans ce pays des merveilles, elle était devenue une coquille vide où chaque personnage serait là pour un rôle bien précis lui enseignant des morales. C'est un fait : Alice est bel et bien à l'école. Elle est là pour apprendre et tirer des leçons des situations.
Viennent ensuite les personnages du pays des merveilles. D'ailleurs quoi de plus étrange que ce pays des merveilles qui ne regorgent aucune merveille... C'est même tout le contraire : des êtres frappadingues, qui torturent leur esprit à se poser des questions sur tout et rien à la fois, et qui sont tous hétéroclites. Comme si cette arche de Noé des merveilles était un pays de références, Lewis Carroll attribue une majuscule pour chaque animal qui le constitue. Mais Alice n'est pas la seule humaine dans l'histoire. Il y a entre autre la Reine, mais au lieu d'y voir quelqu'un de familier, Alice s'aperçoit que celle-ci règne de main de maître sur le pays par le biais d'une violence exagérée (qui couperait la tête à chaque personnage qui oserait défier son autorité) et qui, comme les autres, fait preuve d'une grande absurdité. Car Alice au pays des merveilles, c'est cela : une plongée effarante dans l'absurde où il n'est pas nécessaire de trouver une réponse pour chaque question, et où les historiettes s'enchaînent sans fil conducteur.
Dans le pays des merveilles, le temps est complètement déréglé. Ce n'est pas un hasard si le Lapin Blanc tente de rattraper un temps qui lui échappe, prétextant qu'il est toujours en retard mais ne sachant pas de quoi. Il n'existe aucune époque caractéristique et ce thème du Temps, propre à beaucoup de poètes (comme Baudelaire), est rattaché aux personnages du Chapelier toqué, du Lièvre de Mars et du Loir. Lors du "Thé extravagant", Alice est amenée à être interrogée sur le temps qui passe : en effet, pourquoi ce trio passe t-il le plus clair de son temps à boire du thé et à changer de place continuellement telles les aiguilles d'une horloge ? Le Chapelier toqué ne connaît d'ailleurs aucune réponse et tente d'y trouver un signe et un sens en malmenant des jeux verbaux. Alice de savoir "Pourquoi ?", les personnages de lui répondre "Pourquoi pas ?". Et quand Alice est enfin invitée à raconter une histoire (que ce soit de la part du Chapelier ou de la Tortue), une tradition qui semble être la roue motrice de ce pays, on lui coupe la parole soi-disant parce que cette histoire n'a rien d'intéressant à leurs yeux. Alice ne semble donc pas folle, et au lieu de partir l'air rassuré, elle est vexée de tant d'impolitesses.
Alice est sans cesse victime d'une ironie du sort. Elle qui souhaiterait savoir qui elle est vraiment parvient sans le vouloir à faire comprendre aux autres qui ils sont vraiment. Citons l'exemple de la Duchesse qui demande à Alice de garder son bébé, celui-ci se transforme en cochon après lui avoir sauvé des rafales de casseroles. Ou encore de la chenille, toute pédante sur son champignon, qui prend conscience qu'elle deviendra un papillon... Au final, le seul personnage qui souhaite aider Alice est le chat de Cheshire. Bizarre voire cauchemardesque, ce personnage, bien que fou et contradictoire, est très instable et apparaît devant Alice comme des élans de conscience. C'est le seul personnage à peu près régulier qui viendra voir Alice pour faire le point sur sa quête. Les dessins de Sir John Tenniel ne manqueront d'ailleurs pas de souligner l'aspect très inquiétant des personnages.
Paradoxal, Alice au pays des merveilles n'est clairement pas un livre destiné pour les enfants. Non pas parce qu'ils auraient peurs mais parce qu'ils ne comprendraient tout simplement rien. Moi-même ai pu apercevoir des innombrables détails dont le sens m'a échappé car Alice a besoin d'être étudié profondément et d'être abordé très sérieusement. Passionnant mais ne répondant à aucune caractéristique de son titre, Lewis Carroll mérite la réputation qu'il s'est construit en créant cet univers unique en son genre. Incroyablement riche dans les symboles et presque "visuellement", pas si absurde que ça dans les questions qu'ils sous-tirent à ses personnages, mettant en scène des décors inquiétants et des folles situations, Alice au pays des merveilles est une oeuvre à part, qui a rencontré un tel succès à l'époque qu'il écrira De l'autre côté du miroir, la suite des aventures d'Alice.

jeudi 23 juillet 2009

L'innocence de Tracy Chevalier - critique -

Londres, 1792. Thomas Kellaway, ébéniste de son état, prend à la lettre l'invitation de Philip Astley, directeur du cirque du même nom, et part tenter sa chance à Londres. Mais passer de Piddletown à Lambeth n'est pas sans conséquence pour ses enfants. Ils ouvrent de grands yeux sur la ville tumultueuse et impitoyable que le jeune londonienne délurée Maggie entreprend de leur faire connaître. William Blake, leur voisin, graveur et poète, sera leur guide spirituel tandis qu'ils franchissent le chaotique et exaltant passage de l'"innocence" à l"expérience".
Avec le même talent pour conter ses aventures que dans La jeune fille à la perle, Tracy Chevalier brode là une bien belle histoire sur cette quête initiatique d'enfants qui se cherchent et qui connaissent les affres de la vie citadine. En prenant toujours le soin de décrire d'une manière très attentionnée l'atmosphère des lieux, qui fait dans ses romans son charme principal, Chevalier nous amène à réfléchir sur les qualités et les défauts que la ville peut offrir à des gens issus de la campagne. Utilisant en arrière-plan les évènements qui résident en France, ses échos sur la révolution qui font trembler toute l'Angleterre et l'arrestation du roy Louis XVI, elle implante une ambiance quelque peu sale de ce Londres du XVIIIe siècle. Même si elle n'épargne pas la caricature facile (à savoir qu'en ville, il y a forcément des meurtres et des viols), les personnages qui composent Innocence semblent prendre vie au fil de notre lecture. Car comme toujours, leur présentation est au départ froide voire rigide mais petit à petit on se prend d'amitié pour eux et on veut toujours en apprendre plus. Par exemple, la relation qui unit Maggie, la citadine, à Jem, le campagnard, est magnifique : Chevalier se sert d'eux comme couverture pour mieux symboliser deux mondes totalement différents : à travers les yeux d'une fille qui a grandit bien trop vite et d'un garçon certes débonnaire mais quelque peu naïf. Leur parrain spirituel, c'est William Blake, le grand peintre. Il sillonne le roman comme un fantôme et on ne sait rien de lui sinon son aptitude à composer des belles phrases dont le sens échappe à ses lecteurs. Il apparaît donc comme un ange gardien en avance sur son temps dont la mission consisterait à veiller sur l'innocence de ces enfants tout en leur inculquant l'expérience nécessaire pour endurcir leur caractère. Chevalier joue beaucoup ici sur les contraires amenant à nous poser des interrogations sur nos conditions : celui qui oppose tout d'abord le directeur de cirque Philip Astley, personnage loufoque, avec Monsieur Blake repose sur l'indissociabilité entre l'illusion et le réel : "Somme toute, Monsieur Blake, vous prenez des idées dans votre tête et vous en faîtes quelque chose que vous pouvez voir et tenir dans votre main tandis que moi je prends des choses bien réelles (...) et je les transforme en souvenirs" (page 127). Nous avons donc d'un côté un monsieur qui préfère cacher la vulgarité de son monde en créant des spectacles (un parfait leurre pour s'échapper des tensions du quotidien) et de l'autre, un monsieur qui a compris sa propre réalité. Pareil pour le couple d'enfants Maggie et Jem, représenté par Les chants d'expérience pour l'une, et les chants d'innocence pour l'autre. Même si Chevalier reste plutôt ambiguë sur cette définition qu'est l'innocence (devons nous forcément être issu de la campagne pour l'être ?), Blake arrive en juge impartial en posant face à ce couple d'enfants une question qui planera comme une ombre sur tout le roman : "Supposons que l'innocence soit sur cette rive-ci, et l'expérience sur cette rive-là, qu'y a t-il au milieu du fleuve ?" (p107). Le défaut de Chevalier qui serait de donner une réponse à toute question vient taire un peu la crédibilité de ce côté philosophique, préférant davantage engager le pas sur le fictif plutôt que sur la fable moraliste.
Au final, dans ce Londres impitoyable peuplé de créatures en tout genre, Innocence s'impose comme un beau roman qui décrit si bien ses scènes qu'on le lirait d'une seule traite. Sadique parfois envers ces personnages (l'on retiendra la pauvre Maggie et sa famille violente ; ainsi que les bouleversements qui interviennent dans la vie de Maisie), Chevalier réussit à retranscrire la même poésie que La jeune fille à la perle. Bien que le titre de l'oeuvre soit à mon sens inconvenu et malgré que, sous cette multitude de détails, on se verrait plus en plein XIXe (ce qui pose donc problème), ce livre n'en reste pas moins passionnant et presque trop court. De quoi nous donner l'envie de lire la bibliographie complète de l'auteur pour celui aurait encore faim.

samedi 18 juillet 2009

Et un Onedreamrush, un !

Vous souvenez-vous de l'article postant une vidéo sur ce projet qu'auraient 42 réalisateurs de réaliser chacun un court métrage de 42 secondes ? Le tout révélait une ambiance des plus fantasmagoriques et étranges. Et bien en me baladant sur le web, je suis parvenu à pêcher l'un de ces 42 longs métrages, celui du cinéaste Chris Milk, retraçant la vie d'un homme sur son lit de mort. Le court métrage se nomme LAST DAY DREAM. Je vous laisse juger par vous-même. Mais pour ma part, j'ai eu ma petite larme à l'oeil ! C'est beau, rien à dire de plus :-) Décidément hâte de voir le "film" dans son intégralité !

Harry Potter et le prince de sang-mêlé - critique -

Sixième année à Poudlard : les forces du mal se regroupent et se font de plus en plus pesantes dans le monde réel et de la magie. Harry, aidé de ses amis Hermione et Ron, prépare la bataille de pied ferme et tente de débusquer le moyen qui anéantira Voldemort.
Un an que le film aura été repoussé. A cela s'ajoute donc une attente interminable. Mais à cela s'ajoute aussi un film qui se laisse amplement regarder grâce à une magie qui opère toujours. Décidément, le mois de Juillet symbolise les adaptations de livre au cinéma ! Harry et ses amis grandissent, connaissant les difficultés de l'adolescence. Ce sixième volet, qui fut à la charge de David Yates qui réalisa L'ordre du phoenix, est le meilleur atout du film. Ce cinéaste a pleinement compris l'intensité et l'évolution graduante de l'univers de J.K Rowling, excluant définitivement Le prince de sang-mêlé comme un film pour les enfants. Plus dur, plus noir, plus osé, le film n'en garde pas moins un petit côté féerique. David Yates s'est donc attelé à résumer près de 900 pages en 2h30. Les fans crient au scandale mais sont loin de se rendre compte du travail épouvantable qui doit s'en découler derrière. La difficulté majeure est de comprendre l'oeuvre dans tous les sens pour ne retenir que l'essentiel et ne pas ainsi larguer le spectateur dans cet univers très riche. Trop riche hélas, car pour celui qui n'a pas lu les livres, le pari est à moitié réussi : la fluidité d'une scène à l'autre n'est pas toujours au rendez-vous et on sent constamment que des dizaines d'éléments ont été squeezé. Qu'on se rassure, cela ne nuit en rien à la compréhension générale ; mais on ne peut pas s'empêcher de relever des détails qui, ne passant pas inaperçu derrière la caméra, nous questionnent sur sa place au sein de l'histoire (Pourquoi Luna Lovegood porte t-elle un masque de lion ? Quelles sont les incidences sur le filtre d'amour lancé sur Harry ? Pourquoi des oiseaux volent-ils autour de Hermione lors d'une scène ? Comment se fait-il que les parents persistent encore à envoyer leurs enfants à Poudlard sachant le mal envahir les lieux ?). Autant de questions qui resteront sans réponse. L'univers de J.K Rowling est résolument et incroyablement imaginatif et si riche qu'il en deviendrait hélas presque inadaptable...
Plus bavard donc et moins d'action, ce sixième volet se veut comme le break avant la bataille qui fera rage. Les effets spéciaux n'en sont pas pour autant en reste. Utilisés avec parcimonie et utilisés avec les derniers moyens technologiques à ce jour, ils sont totalement bluffants de réalisme. La prestation des acteurs s'améliorent d'année en année (Hermione moins maniérée, Ron moins tête à claques et Harry plus à l'aise devant la caméra). Décidément, Harry Potter et le prince de sang-mêlé confirme le bon choix d'avoir élu David Yates au travail de la réalisation. Critiquer ouvertement et en détail le film revient à critiquer le livre, livre que je n'ai pas lu. Je m'en tiens à donc à ce que mes yeux ont découvert : c'est à dire un spectacle inspiré, dense et enchanteur. Vite la suite !

jeudi 16 juillet 2009

The reader - critique -

En Allemagne, au lendemain de la 2nde guerre mondiale, un jeune adolescent Michael Berg fait la connaissance d'une femme Hannah Schmitz faisant le triple de son âge et s'embarque dans une liaison passionnelle et passionnée. Un jour, la femme déménage sans laisser de trace ce qui rend un Michael inconsolable. Huit ans plus tard, par le plus grand des hasards pendant un stage, étant devenu étudiant en droit, il la retrouve sur le bancs des accusés pour crime contre l'humanité...
Ce qui est formidable et appréciable avec Stephen Daldry, c'est qu'il ne joint jamais l'utile à l'agréable et encore moins la facilité à ses longs métrages. Le sujet, grave et casse-gueule, est étonnamment bien traité et se révèle au final d'une intelligence rare sans faire ainsi fi des actes de certains de ses personnages.
A la base, the reader est un roman écrit par Bernard Schlink dont la qualité d'écriture et de scénario acclama le public. Ici, nous sommes loin d'une transposition ratée d'un certain Hérisson tant l'on y reconnaîtrait l'ambiance lourde et froide qui se dégage des lignes. Hannah, jouée par Kate Winslet encore une fois admirative, est un personnage à deux facettes et sa complexité n'a d'égale que son charme naturel (on comprend le béguin du jeune pré-pubère). Leur relation secrète est filmée avec beaucoup de tact, entre des ébats érotiques très sensuels qui ne tombent jamais dans le voyeurisme, et des échanges de conversations enjouées qui rattrapent leurs personnages sur le voile qui recouvre l'âme de leur coeur. Cet amour, fondé sur la lecture que le jeune homme transmet généreusement à sa maîtresse, lui permet de vaincre sa jeune timidité et de s'affirmer ; et à Hannah, de s'évader dans des univers de fantasmes et d'illusions, au loin d'un monde qui a connu il y a quinze ans de cela, les atrocités dont on connaît à peu près tous.
Daldry, à la manière de The hours, a cette façon de filmer d'une manière assez peu chaleureuse voire conventionnelle car cela se ressent même dans les éclairages et les décors, plantés et sobres, dans un Berlin dont on sentirait encore l'odeur des bombes. Mais surtout, le ou les thèmes traités deviennent problématiques. Confinant des sentiments entre dégoût et empathie, on invite le spectateur à écarter deux minutes son sentimentalisme mélodramatique au profit de sa raison. Car le film est scindé en deux parties : l'histoire des amants pendant un été, puis le procès (avec des va et vient de sauts dans le temps). Daldry ne cherche donc pas à ce que l'on s'attache à ses personnages pour peut-être mieux les pardonner mais au contraire il souhaite que l'on aborde les contours de leurs esprits pour mieux les cerner. Les abysses de la culpabilité, un amour contrarié, les responsabilités... autant de thèmes qui acquièrent une force et une audace sans égales.
La seconde partie du film qu'est le procès d'Hannah et par là même la découverte de son secret pourrait se résumer à l'une des phrases que débite le professeur de droit, joué ironiquement par Bruno Ganz, le Hitler de La chute. Il affirme que "La société croit pouvoir se fonder sur ce qu'elles nomment les valeurs morales, mais c'est faux". En effet, dans cette colère qu'est la nôtre, retransmise et inculquée à l'école sur les atrocités commises par les nazis et qui se cache derrière nous tous face à des bourreaux qui ont commis l'impardonnable face à la population juive dans les camps, on serait tenté de voir Hannah comme un monstre. Or, le cinéaste n'emprunte jamais le chemin de la facilité. Certes les actes sont là (dont je ne dirais rien), mais le secret que renferme Hannah lui vaudrait presque une rédemption quasi-instantanée. Le trouble qui règne dans les scènes de procès, la froideur des plans, le vide qui se remarque dans les yeux de Hannah, la grande contrariété émotionnelle de Michael, les dialogues entre procureur et accusée sont filmés très intelligemment. On aurait pu s'attendre à davantage de pathos ou de scènes larmoyantes : quelque chose qui nous remue bien l'estomac face à l'ampleur du drame. Et c'est ce qui nous décevrait presque car Daldry reste décidément distant avec ses personnages tout en dépeignant leur cas de conscience et leur intimité la plus profonde.
Il est regrettable à mes yeux que la statuette ait été remise à Winslet pour ce rôle là et non pour celui qu'elle tient dans Revolutionnary Road, bien que crevant comme toujours l'écran. En nous proposant une réflexion aussi fouillée dans une histoire qui n'impose aucun manichéisme, on s'étonne nous même d'adopter une attitude impartiale face aux situations qui défilent dans The reader. La grâce des sentiment retranscrits, qui vont d'un regard amoureux à une main fuyante, apporte une pointe d'intensité dramatique sans pour autant dénaturer ses propos. La qualité scénaristique se révèle très pertinente et les acteurs habités ainsi que la musique amènent beaucoup de force. Nous détenons là un très beau film, un peu bavard, long et lent, mais assurément intelligent pour l'apprécier à sa juste valeur.

samedi 11 juillet 2009

Diabolo menthe - critique -

En 1963, Anne et Frédérique, deux soeurs agées de 13 et 15 ans, rentre à Paris chez leur mère pour se préparer à leur nouvelle rentrée des classes. C'est l'histoire de leur adolescence. De son éveil et de son évolution.
Diabolo menthe fut un véritable phénomène lors de sa sortie en 1977. En effet, le film de Diane Kurys, qui réalisa là son meilleur film et qui fut récompensé par le prix Delluc, s'adresse aussi bien aux deux sexes qu'aux adolescents et aux adultes (pour les nostalgiques d'une époque bien révolue). Toute l'intensité des scènes et la presque magie qui s'en dégage, on le doit au regard intemporel de Eléonore Klarwein, vibrante d'émotions en petite fille qui se transforme en adolescente. Quant à l'ambiance de cette France à jamais disparue et de ses cours d'écoles, elles sont retranscrites à travers les yeux et la caméra d'une adulte qui se retransforme en midinette le temps d'un long métrage. Qui dit donc retranscription, dit retour à la naïveté (la scène presque innocente des trois copines qui discutent à la cour de récré en est la plus belle preuve). Qui dit retranscription dit aussi rappel de tous ces souvenirs hilares, de toutes ces anecdotes universelles des élèves qui se moquent royalement de leurs professeurs, dénués d'autorité pour certains (pauvre Dominique Lavanant qui en prend plein la tronche) et complètement barjots pour d'autres (la prof de dessin).
Anne et Frédérique représentent donc à elles deux les symboles d'une France à la veille de mai 68. Des évènements se préparent et les personnalités se construisent. Anne, c'est la candeur, la douceur, le petit bout de femme incomprise par son entourage qui regarde, qui apprend et qui fait des erreurs aussi. Frédérique, c'est la révolté, la franche qui rappelle un peu les traits de sa mère qui affirme clairement son divorce dans une époque où ce genre de chose est mal perçue par la société. Les chiens ne font pas des chats. Mais ce qui rend tellement attachant Diabolo menthe, c'est que le film ne se prend jamais ni au trop grand sérieux, ni à la comédie poussive et parce qu'il a su aussi traverser les générations. Car même si l'on a jamais vécu cette époque, on se retrouve tous dans l'une de ces situations : les guerres entre frères et soeurs, le premier baiser, le décalage de génération avec la mère, les mauvaises notes, le souci de toujours faire comme les autres pour rentrer dans le moule (...) : autant de moments que l'on repense avec le sourire. Que ne serait aussi Diabolo menthe sans son compositeur Yves Simon qui nous offre ici une belle musique finale résumant pratiquement une décennie entière à savoir les années 60 en France. Cette France qui ne connaît pas encore les affres des téléphones portables, les films de plus en plus dérangeants au cinéma, l'insécurité croissante et la violence banalisée des rues, la marée de touristes dans la capitale...
Diabolo menthe se doit donc d'être clairement consommée comme une boisson car rafraîchissante, poétique et surtout très drôle de nostalgie. Plongé dans le beau Paris à la veille d'une révolte qui changera à jamais sa face, le film est magnifique et constitue alors une petite perle dans la cinématographie française. A consommer toutes saisons confondues.

jeudi 9 juillet 2009

Bancs publics (Versailles rive droite) - critique -

Bancs publics ou l'histoire de plusieurs histoires dans une seule histoire. L'histoire de trois employées de bureau qui tentent de découvrir ce qui se cache derrière la banderolle "HOMME SEUL" accrochée à un balcon dans l'immeuble d'en face. L'histoire de gens dans un parc, à discuter et à flâner. Et l'histoire de plusieurs employés dans un magasin de bricolage.
Bruno Podalydès semble toujours avoir affectionné la ville de Versailles avec un de ses précédents film Versailles rive gauche. Il revient donc avec un film chorale Bancs Publics où il met en scène dans un grand bric-à-brac une pléiade d'acteurs plus ou moins connus sur fond de décors qui traversent notre quotidien : un bureau, un parc puis un magasin. A l'intérieur de chacun, on trouve des gens (et non des personnages), ceux que l'on croisent dans la vie de tous les jours. Nous ne connaîtrons pour la plupart ni nom, ni prénoms et on les connaît comme on aurait pu être leur collègue, un piéton ou bien un client. La poésie n'est jamais bien loin et Podalydès couvent ses petits acteurs en signant ici une oeuvre pas méchante du tout qui tente d'embellir les petits riens du quotidien. On se reconnaît (reconnaîtra ?) dans une des situations, cocasses ou nostalgiques, et bien que n'apportant aucun intérêt sur le fond à voir un homme qui filme la vie telle qu'on la voit en dehors de la salle de cinéma, on remarque sur la forme l'apport personnel et plutôt intime d'un monsieur qui voit la vie telle qu'il la perçoit.
La première partie est la plus poilante : on suit les "aventures" de collègues de bureau qui tentent d'assouvir leur curiosité en menant leur enquête sur cet "HOMME SEUL". La seconde est presque émouvante : elle offre toute une mosaïque de gens en tout genre (clochard brailleur, amoureux silencieux, gamins éveillés...) et l'émotion naît dans cette naïve véracité des faits et gestes de chacun d'entre eux. On sourit en se rendant compte que chacun possède un potentiel pour créer son petit univers : le père qui guide son bateau dans la fontaine comme un enfant, la petite fille qui bâti son tunnel magique et parle comme une adolescente, l'employé écologique qui aspire les feuilles en pouffant de rire, les vieux qui jouent au backgammon entre deux verres comme deux gosses...). En revanche, la troisième partie traîne en longueur et se démarque clairement des autres par son aspect très monotone. On ne sait pas où veut en venir le réalisateur. C'est froid, c'est lent, et on sent se dégrader le film qui avait si bien commencer. Dommage... Bancs Publics est donc un film qui ne fait pas rêver comme le Cinéma est en mesure de devoir le faire, c'est clair. En revanche, en filmant les petits riens qui font le tout de notre quotidien, on est embarqué dans cette petite odyssée versaillaise sans prétention qui se décline hélas aux deux quarts du film mais qui cherche malgré tout à nous faire voir dans le noir un peu de rose et à prendre parfois du recul face aux ennuis qui envahissent nos vies.

mercredi 8 juillet 2009

The descent - critique -

Au milieu des massifs Appalaches, six femmes décident de se retrouver pour une expédition spéléologique. Soudain, un éboulement se produit bloquant ainsi la sortie de secours... Elles devront, dans le noir, affronter leurs angoisses, d'autant plus qu'elles réalisent qu'elles ne sont pas les seules dans ces grottes...
Loin du tumulte qu'avait provoqué à sa sortie The descent en 2005, je remarque que pour le coup nous avions il y a trois ans un vrai film d'horreur qui fait vraiment peur et qui expose nos peurs primales dans un survival qui vire au carnage total. 100% féminin, The descent n'en ai pas moins fleur bleue. Bien au contraire, ces six femmes exposées au danger se font très hommes et leur volonté de s'échapper et de faire face à l'incroyable testostéronent leurs agissements. Le fait d'amener de la psychologie au récit apporte sa petite touche de complexité, et débride ainsi du mieux qu'il peut (sans pour autant les justifier) la sauvagerie des scènes couvrant les trois derniers quarts d'heures du film, qui atteint réellement des sommets. Cela n'a pas empêché Neil Marshall (le réalisateur) d'inviter le spectateur à quelques passages oniriques grâce à une belle partition musicale, permettant d'introduire son film dans une sincérité profonde en prenant bien le temps d'exposer les faits. Non, il n'y aura pas que de la barbaque ici, il y aura, quoiqu'on le perçoive, du sentiment (impossibilité de faire un deuil, égoïsme effronté de l'être humain...). Les actrices, à défaut il est clair d'avoir un oscar, ne sont pas complètement potiches et remplies dûment leur contrat, à savoir nous faire communiquer leurs angoisses, leurs peurs et leurs détresses au point d'en éventrer l'accoudoir du fauteuil. De plus que Marshall n'est pas tombé dans le piège de profiter des situations cocasses pour filmer les jolies fesses de ces actrices, ce qui exclu The descent de le faire passer pour un nanar commercial.
Ce qui fait peur et ce qui innove (sur grand écran, l'expérience doit être décuplée), c'est le lieu où se passe la deuxième moitié du film. Lieux claustrophobiques extrêmes, les grottes souterraines représentent de vraies tombes humaines qui suintent l'humidité et la poisse ; et de rajouter ici des monstres amène encore plus de folie à l'atmosphère générale de peur panique. En terme de lumières, le film est maîtrisé car que ce qui aurait pu se révéler comme un film brouillon où l'on n'y voit rien, se révèle au bout du compte amplement visible dans son obscurité. Alternant les lampes torches, l'infra-rouge de la caméra, les fusées d'alertes et les néons, les entrailles de la terre deviennent ici un enterrement du corps et de l'âme. A mesure que les minutes qui se déguisent en heures passent, les victimes deviennent bourreaux et deviennent aussi sanguinaires et monstrueuses que leurs agresseurs (pas dépourvu tant que ça d'une conscience).
Neil Marshall signe un petit film bien sympathique, gore, terrifiant et étouffant comme on est surpris pour un film venant du Royaume-Uni. Le parti pris s'engage jusqu'au final, apothéosé et magnifié par un dernier plan séquence de toute beauté. Chacun interprètera sa propre fin. Et de laisser ainsi au spectateur, malgré tout ce déchaînement de violence qui fait détourner les yeux (certaines scènes sont parfois à la limite du soutenable), le choix de comprendre subjectivement l'issue du film, prouve bien qu'on est loin d'avoir à faire à un amateur qui aurait bâti son long-métrage sur le jeu déhanché de ces actrices.

N.B : l'interdiction aux moins de 16 ans est largement justifié.

lundi 6 juillet 2009

Le hérisson - critique -

L'histoire d'une rencontre inattendue : celle de Paloma, jeune fille de onze ans intelligente et suicidaire, de Renée Michel, la concierge de son immeuble et du nouveau propriétaire japonais d'un appartement Monsieur Ozu.
Inattendue, c'est bien le mot. Tellement inattendue d'ailleurs qu'on y croit malheureusement pas une seule seconde.. N'ayant pas lu le roman, je ne peux que me baser sur le film mais beaucoup de critiques et d'adorateurs de cette oeuvre ont souvent qualifié le livre d'inénarrable, de par son multiple récit aux narrations diverses qui se révèlent extrêmement personnalisables aux yeux de son lecteur (on créerait nous même une ambiance). Mona Achache, la réalisatrice, tisse ses personnages dans la pire des caricatures possibles, au point que son film devient à cause de cela presque irregardable de grotesquerie. La petite Paloma (pourtant bien jouée de façon plutôt mature par Garance Le Guillermic) est bien trop intelligente à la limite du surhomme. Ses phrasés, son point de vue, sa vision du monde... ne collent absolument pas au physique de la jeune fille, et ce n'est pas sa salopette sur fond de tee-shirt marin St James qui viendront démentir mes propos. Le personnage, très complexe (comme tous les autres), n'aspire aucune empathie. Ses parents, vieux bourgeois coincés proche des Le Quesnoy, ne font pas exception. On verra la mère déambuler dans son gigantesque appartement 16ème arroser ses petites fleurs dans son drapé Prada ; la grande soeur qui a son petit copain qui se nomme Tibère et qui insulte la concierge car socialement plus bas qu'elle ; et enfin le père qui frôle l'absentéisme. Rien que par ce petit tour d'horizon, le film devient déjà terriblement ennuyeux et on se lèverait presque pour quitter la salle.
Mais le summum de l'hypocrisie trash et archétypale revient au personnage japonais. Dégoulinant de bonnes valeurs, forcément raffiné et élégant car japonais, forcément bien éduqué et ayant des bons goûts, Achache dépeint son personnage dans une écoeurante inconsistance car dénué de toute réalité. Tout d'abord, jamais un japonais qui vient d'acquérir un luxueux appartement bourgeois parisien ne s'aviserait de "côtoyer" la concierge, laide de surcroît. Dans ce pays obsédé par les apparences et les différences sociales auxquelles ils les bloquent par des barrières retords, la concierge passerait comme presque insignifiante. Or dans le film, on détecterait un sentiment amoureux entre les deux, suffisamment fort en tout cas pour être unis spirituellement. Et les dialogues sont par moment si artificiels qu'on serait tenté de croire qu'il séduirait la concierge dans le seul et unique but de vanter sa grande richesse.
La seule, et je n'en attendais pas moins, qui sort son épingle du jeu est Josiane Balasko. Elle joue Renée toute en retenue, profondément inspirée et qui éveillerait même, dans ce bourbier faussement arrogant, un solide attachement pour son personnage. Tiraillé par ce besoin de rester à sa place et de bouger dans l'évolution sociale en traînant avec les nantis, Renée est, derrière l'archétype, la concierge française par excellence. Sa culture générale immense, sa simplicité, son intelligence invitent à s'interroger sur ce complexe et non moins ambigu personnage. Mais c'était sans compter la scène finale, involontairement comique ; comme si Achache avait peur de prendre des libertés pour donner plus de panache et d'envergure au roman de base, et qui se contente ainsi de virer à l'extrême classicisme de par une fin qui vire au n'importe quoi, ni fait ni à faire.
En conclusion, je dirais que le hérisson vaut le détour grâce à Balasko, dont la prestation est la plus convaincante de toute. Même si retranscrire une oeuvre sur grand écran relève comme toujours du défi, je pense qu'en terme de scénario et de complexité des personnages, Achache pouvait réaliser là un bien beau film à la limite d'une fable moraliste. Mais il n'en est rien. Creux, méchamment caricaturé, bavard et ennuyeux, ce presque huit-clos est une petite déception. Achache a vu grand, peut être trop et malheureusement pour elle, cela se ressent à chacune des minutes...