Le père de Bazil meurt tragiquement dans le désert marocain en ayant découvert par hasard une mine explosive. Trente ans plus tard, c'est au tour de Bazil lui-même de manquer de chance : il reçoit une balle perdue en pleine tête... Guéri mais dorénavant à la rue, Bazil fait la connaissance d'une bande de curieux personnages, logés dans un grand tunnel recyclé en carrosserie et ferraille en tout genre. Puis un jour, Bazil se retrouve par hasard devant les immeubles des sociétés qui ont été responsables de ses malheurs. Il décide de se venger...
Huit ans après l'inoubliable, que dis-je, l'indétrônable fabuleux destin d'Amélie Poulain, Jean-Pierre Jeunet reprend les commandes pour notre plus grand plaisir. Même filtrage sépia dans l'image, même style dans la réalisation, la patte Jeunet est unique en son genre et redore le blason du cinéma français. Plus encore, les présentations avec de nouveaux personnages, le plongeon dans un nouvel univers procurent la même sensation que lors de ses précédents films. Une sensation magique qui se décuple à chaque plan qui passe. L'incroyable imagination de ce talentueux cinéaste va de pair avec son incroyable capacité à pouvoir nous la montrer sans retenue. On sent tout l'amour qu'il porte au septième Art ce qui confère à Micmacs à tire-larigot un film intemporel en hommage à tous les autres. L'oeuvre de Jean-Pierre Jeunet est à voir comme l'abri recyclé où séjourne la bande : une véritable récupération des classiques du genre, de Casablanca à Tex avery.
Une fois de plus, Paris est ici peint "à la Jeunet", baignant dans des tons chauds, dans un ciel marbré de nuages ocres et d'un gris lumineux, et toujours ce jaune saturé qui permet de donner un effet carte postale dont les contours auraient vieilli avec le temps qui passe. On pourrait presque croiser Amélie ou Nino Quincampoix dans le quartier de la Goutte d'or ! Et quant au fort d'Aubervilliers, il passe même pour un lieu enchanté, où se promener sous le périphérique est enclin à séduire n'importe qui. Micmacs à tire-larigot ou le rêve dans toute sa splendeur, entre un humanisme touchant et une ambiance qui hypnotise littéralement.
En terme de scénario, tout n'est que trouvaille (mais sur-alambiqué peut-être). La bande de Bazil, tous farfelus et attachants, constitue le noyau même du film. Enchaînant des gags hilarants, jamais poussifs, mais surtout les élucubrations de ces personnages, montant et démontant toutes sortes de plans ingénieux, le film n'ennuie jamais sinon d'agrafer un permanent sourire. Notre cerveau, scindé en deux, répond d'une part à l'enfant qui ne nous a jamais quitté, dont les yeux brillent devant tant de second degré magnifique ; d'autre part à l'adulte, dont la maturation sert à percevoir et respirer la magie quand elle est présente. Dany Boon est bien plus mis en valeur que lors de ses précédents films et témoigne correctement d'un jeu confortable dans son domaine, celui de la comédie. La prestation de chacun ne faiblit jamais, Yolande Moreau toujours en forme, et Dominique Pinon en éternel looser attendrissant.
La créativité de Jeunet paraît décidément sans faille et sans limite. Le débordement de passion qui anime la personnalité du monsieur s'offre à nous comme un très beau cadeau, preuve que le cinéma d'auteur est ce qui se fait finalement de mieux. Bien que se positionnant parfois dans un parti pris politique qui aurait pu tourner plus court dans certaines scènes, Jean-Pierre Jeunet est la preuve vivante que le talent, le vrai, se renouvelle sans arrêt. La magie du cinéma ici prend tout son sens ; Micmacs à tire-larigot est une déclaration d'amour et un enchantement pour le moral, ce qui se fait avec les temps qui courent trop rarement hélas.
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