lundi 5 mai 2008

American beauty - critique -

Une maison de rêve, un pavillon bourgeois discrètement cossu dissimule dans une banlieue résidentielle, c'est ici que résident Lester Burnhamm, sa femme Carolyn et leur fille Jane. L'agitation du monde et sa violence semblent bien loin ici. Mais derrière cette respectable façade se tisse une étrange et grinçante tragi-comédie familiale ou désirs inavoués, frustrations et violences refoulées conduiront inexorablement un homme vers la mort.
American beauty, c'est un peu le genre de film que l'Amérique dénigre. Il traite des failles du système américain comme celui de l'"American way of life" : ce mode de vie idéalisé qui n'existe tout simplement pas, et dont la seule chose que l'américain conservateur puisse faire pour le sauvegarder c'est d'en montrer ses apparences, signes extérieures de richesse. Le film propose de nous plonger dans une famille bourgeoise : on la suit dans leurs moment les plus intimes jusqu'au point de chute. On évite tout stéréotype : ici c'est la femme qui commande. Elle castre son mari comme elle coupe la tige de ses roses rouges, et a la main mise sur sa maison, où chaque objet est savamment étudié pour épater l'invité (=le spectateur ?) de par son coût et sa beauté. Seulement la beauté n'est jamais là où on croit qu'elle est. La beauté, dans le film, c'est Lester, le père de maison. Il souffre de cette vie routinière sans saveur jusqu'au jour où il rencontre Angela, l'amie de sa fille. Il en tombe immédiatement amoureux. Cette relation que l'on pourrait penser vulgaire de par la différence d'âge qui les sépare n'est en réalité pour Lester le seul moyen de s'évader dans un tourbillon de beauté et d'amour. La beauté n'est pas tant celle que nous voyons, mais plutôt à travers de celui qui la perçoit. De plus le film met constamment en garde le spectateur par le rouge, omniprésent. Il montre que cette couleur peut aussi bien symboliser un instant de pure magie (les pétales de roses), qu'un instant purement sexuel (Angela qui prend son bain), ou encore qu'un instant de mort (celle de Lester). Le sang ici ne choque pas, mais est artistique. En cela, la photographie est fantastique car elle constitue un personnage à part entière (le film en a reçu un oscar). Les gens que l'on croit dans l'ombre sont en réalité des êtres qui tentent de trouver la beauté là où personne ne peut la chercher, trop occupé à conserver leur apparence. En cela, le voisin que l'on pense glauque au début, et voyeur de surcroît, se révèle étonnamment beau intérieurement : il filme la vie autour de lui pour mieux s'en imprégner et remarquer s'il y a des choses que l'oeil de sa caméra voit que lui ne peut pas voir. A l'inverse, Angela, que l'on pense être une bombe de charme et d'élégance n'est en réalité qu'une petite fille timide et réservée, qui a peur d'être jugé et qui se contente de ne montrer ses signes physiques de beauté. En ce qui concerne Caroline, la mère de la famille, elle est tout aussi perdue que son mari. Seulement, elle ne le manifeste pas. Et c'est la raison pour laquelle, au lieu de venir en parler à son mari et d'essayer d'arranger la situation, elle le trompe et se prend des cours de tirs. Au final, tout le monde est une victime. Victime d'eux mêmes, de leurs propres choix, et de leurs engagements. L'art de cacher l'éléphant dans la pièce ne constitue pas en soi un mode de vie, et c'est en cela qu'American beauty touche juste, que ça plaise ou non. Ils ont beau avoir tout pour être heureux : une belle maison, un beau quartier, une belle situation ; si on ne sait pas vivre avec les uns et les autres, c'est que tout ce cadre idyllique n'est qu'une enveloppe, qui ne satisfait personne au bout du compte. Tout le monde l'a compris, mais à la toute fin quand un évènement ne permet plus de revenir en arrière. Ainsi, on réalise que nous sommes très loin d'être parfait et qu'American Beauty nous pousse à changer certains de nos comportements pour mieux blanchir le contenu de nos âmes.

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