Annonçons le dès le départ : cette saison 4 reste la moins bonne des cinq. Non pas qu'elle soit mal écrite (loin de là, comme toujours), non pas qu'elle soit mal jouée, mais parce qu'on se perd parfois dans quelques stérétoypes. Mais rien de bien méchant. Explications.
Nous avions quitter Nate dans une grande détresse émotionnelle (Lisa sa femme est décédée). Ainsi, toute la saison 4 raconte son deuil et son parcours reconstructif. Il a besoin de souffrir pour se libérer du poids de culpabilité qu'il ressent face à ce drame, et essaye tant bien que mal de sortir sa tête de l'eau. En vain... Il quitte les pompes funèbres, n'arrivant et ne supportant plus de canaliser le chagrin de ses clients. Il part dans des petits boulots, et concentre toute son énergie à l'éducation de sa fille Maya. Il retentera sa chance avec Brenda, acceptant l'idée qu'ils ne peuvent vivre l'un sans l'autre.
Brenda, de son côté, continue sa désintoxication du sexe. Elle rencontre son voisin lynchien Joe (Justin Théroux) et s'efforce de vivre avec lui une relation standard agrémentée d'une sexualité standard. Sauf que Brenda n'a rien de standard. Moins barrée et complexe qu'auparavant (elle parait presque guérie et apte à assumer ses problèmes de névrosée), elle continue ses études et mène donc sa petite vie d'autre Brenda. On la sent mieux dans sa peau.
La saison 4 a davantage mis l'accent sur le personnage de Rico, l'assistant des Fisher. Son parcours est ici chaotique : besoin de voir ailleurs, conséquence de l'adultère. C'est l'explosion de sa bulle familiale et en cela la saison 4 a bien été ficelée car elle nous permet enfin de voir des scènes entre Rico et les membres de la famille Fisher dans une grande intimité.
Ruth, à l'instar de Brenda, mène une nouvelle vie. Mariée et comblée, elle voit en Georges un époux parfait... avant qu'elle ne se rende compte qu'il n'est rien de tout ça. Progressivement, elle se sent exclue voire rejetée par son mari. Mais contrairement à Nathaniel senior, elle manifeste son mécontentement et sa colère chaque fois que quelque chose dans le comportement de Georges la déroute. Elle veut rencontrer le passé de son mari, alors que celui ne le veut pas. Elle a épousé un homme qu'elle croyait connaître alors que celui-ci combat ses propres démons intérieurs.
Claire se veut dans cette saison être une fille complètement paumée. Elle voit dans l'art une excuse à la consommation de drogues pour tenter de trouver dans ce domaine des manifestations inconnues. C'est "clair", on ne la reconnaît plus. Elle est agressive, devient pendant un temps homosexuelle, et fait rage contre les piques acerbes de Russell, son ex. Devenue autonome, elle vit dans le pavillon de sa maison, qui se transforme en vrai chantier hippie combinant sexe à plusieurs, alcool et marijuana.
Enfin la relation entre Keith et David prend une tournure très malsaine. Ils acceptent de se remettre ensemble tout en autorisant l'un comme l'autre d'avoir des dérapages en allant voir ailleurs. L'innocence de David sera perdue à jamais avec l'épisode le plus foudroyant et violent de Six Feet Under "That's my dog" où beaucoup dans sa personnalité changera. Comment se reconstruit-on après une agression ? Doit-on voir en cela une leçon de la vie, ou bien quelque chose qui permet d'évoluer et de gagner en maturité ?
La saison 4 a donc du mal à démarrer et se perd beaucoup dans le sexe et la drogue à outrance (facette réelle de notre société). Chacun ici a ses fantômes : Georges et ses six anciennes femmes, Rico et sa maîtresse de passage, Nate et feu Lisa... Je parlais tout à l'heure de stéréotypes. En effet, le passage de "Il faut être défoncé pour atteindre les magnificences artistiques", "le passage forcé dans l'homosexualité" ainsi que "le passage forcé dans l'hétérosexualité" (Keith et son dérapage avec la starlette) auraient pu être évités... Même si on comprend que Claire voyait en sa copine Edie une muse artistiquement et esthétiquement sexuelle, on ne comprend pas en revanche sa virée éphémère dans le lesbiennage. On tolère toutefois les scénaristes qui ont concentré beaucoup d'efforts dans l'évolution des personnages de Ruth, David et Brenda. Ruth est maintenant une femme qui s'impose et se fait obéir (merci Bettina), David redevient un petit enfant replongé dans ses peurs les plus refoulées et Brenda devient une femme vulnérable avouant qu'elle souhaite finalement ce que toute femme souhaite en ce monde : une maison, un mari et des enfants. Elle cesse de se plaindre de sa famille détraquée car elle a réussi à prendre beaucoup plus de détachement envers elle.
Malgré donc ces quelques faiblesses, cette saison 4 se révèle néanmoins excellente. Il est toujours aussi difficile de rédiger une critique sur une série comme Six Feet Under car il y a tellement à dire, à commenter, à faire partager que c'est tout bonnement impossible d'être complet... Les nombreux rêves, hallucinations et cauchemars qui peuplent ces douze épisodes sont extrêmement intéressants (subconscient qui travaille sans relâche) et intraduisibles avec les mots sinon de les prendre un par un et de voir le pourquoi du comment. Ce qui est sûr, c'est qu'à ce stade, chacun a su trouver son attachement envers les personnages (avec ses préférences). Et quand on sait qu'il ne reste plus qu'une saison sur cette série qui arbore de manière la plus intelligente qu'il soit, la vie telle qu'elle est, on frémit à l'idée de savoir ce que les scénaristes et Alan Ball ont pu nous concocter pour le final. Ce qui est sûr, c'est que nous ne ressortirons pas indemne de cette expérience infiniment mature et bouleversante de vérité...
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