mercredi 28 mai 2008

Six Feet Under - critique saison 5 -

Et voilà, l'inévitable arrive. Toute chose a une fin et se doit de finir. Même cette superbe série sur la mort et la vie comme elle n'est pas facile. Oubliez les petites faiblesses de la saison précédente, celle-ci surpasse tout. Je viens de finir l'ultime épisode Le Monde Attend, la larme à l'oeil, et vient d'éteindre le lecteur dvd, la main tremblante. C'est donc sur le coup de l'émotion que je rédige cette critique sur la saison 5, qui s'achève dans une violence émotionnelle inouïe, encore jamais vue sur petit écran, toutes séries confondues. Attention, chef d'oeuvre !
La saison s'ouvre sur un heureux évènement et nous retrouvons donc notre famille Fisher. Car oui, même si ce ne sont que des personnages entièrement fictifs, nous avons vécu près de leurs côtés pendant cinq années de leur vie, nous nous sommes identifiés à eux, et c'est la raison pour laquelle nous pouvons affirmer être presque en face à des amis à qui l'on tient. S'ils tombent, on tombe avec eux. Les scénaristes, fiers de leur génie créatif, le savent et arborent dangereusement, dans la plus grande des maîtrises, des ficelles que nous tenons et que l'on tiendra pour toujours : les ficelles de nos vies.
Brenda a soif de renaissance et veut créer une nouvelle vie malgré (et elle le sait pertinemment) l'héritage psychotique de ses parents. Dans son douillet foyer, elle adopte sans difficulté Maya, la fille de Nate mais ne peut s'empêcher de penser au fantôme de Lisa qui rôde autour d'elle, tel la mouette qui picore son gâteau de mariage (réincarnation de Lisa ?). Tout cela est d'autant plus troublant qu'à l'annonce de sa grossesse devant une masse d'invités, un autre oiseau (bleu=signe de la miséricorde ?) fait son apparition, venant une nouvelle fois jouer les troubles-fêtes. Nate, qui subliminalement voit en cet oiseau l'esprit réincarné de son ex-femme, le tuera d'un coup de balai. Le message est clair : il fait comprendre à Lisa qu'il a enfin tiré un trait sur tout ça et qu'il veut mener sa nouvelle vie auprès de Brenda et de Maya. De plus, Brenda se montre plus enclave aux sentiments humains. Elle est elle-même étonnée de l'insensibilité qu'éprouve ses collègues psy au sujet de cas particulièrement éprouvants à supporter. Elle veut faire bonne figure à Nate, et joue le rôle de la ménagère qui mitonne de bons petits plats le soir.
Nate joue aussi les bons pères et veut le mieux pour Maya. Mais les disputes avec Brenda reprennent le dessus comme autrefois. Le vice et la vertu ne font plus bon ménage. Elle, a été élevé dans une éducation sans limites, Lui, a été élevé dans une éducation avec plein de limites. La passion sexuelle qui les animait ne suffit plus à créer une vraie relation sincère et fructueuse. Ce ne sera que plus tard que Nate se rendra compte que leur relation n'a plus d'avenir, et qu'au final, ils formèrent un couple qui ne s'est jamais réellement aimé. Il fait la rencontre de Maggie, la fille de Georges, avec qui il tisse un beau lien. Les silences et les sourires en disent parfois plus longs que les mots...
Ruth, elle, est au bord du gouffre : elle se revoit vivre les pires années de sa vie du temps où elle s'occupait de sa grand-mère cul-de-jatte car maintenant c'est Georges qu'elle doit assister, qui fit un séjour à l'hôpital psychiatrique en raison de sa dépression psychique. Elle est très en colère et est lasse de la gente masculine. Elle se force à rester auprès de Georges par pure compassion pour son état mental (le pauvre a perdu sa mère qui s'est suicidé devant lui alors qu'il n'était qu'un enfant. On le sait, Ruth ne le sait pas) mais se résoudra à l'éloigner de sa vie en lui prenant un nouvel appartement. Georges n'est pas dupe et accepte ce contrat (en lui disant cela, Ruth laisse tomber un sac de poêles et de casseroles comme pour se libérer d'un poids).
Claire, de son côté, est fâchée contre sa mère car cette dernière n'accepte pas les choix qu'elle adopte. Les tensions au sein de la mère et de la fille sont très palpables. Claire se montre de plus en plus égoïste, une gamine qui ne veut pas éclater sa bulle d'artiste ratée. Après sa relation avec le frère de Brenda, Billy, des plus désastreuses, elle ira travailler en tant qu'intérimaire dans une entreprise. Elle apprendra de ce monde qu'il est réellement étouffant (les plans sur les buildings donnent le vertige comme pour déstabiliser le spectateur). Le personnage gagne beaucoup en maturité car elle se rend compte de ses erreurs passées (elle revoit sa bande d'amis artistes et se rend compte qu'ils sont restés au point mort).
David et Keith forme dorénavant un vrai couple qui s'aime. Leur trame vient dans l'adoption d'un enfant et toutes les difficultés que cela entraîne lorsqu'on est gay. David craint que la personnalité violente du père de Keith ne fasse irruption chez ce dernier ; et Keith craint ne pas être à la hauteur dans la discipline qu'il souhaite instaurer.
La saison 5, tout comme la série, atteint un degré de perfection extrême. Elle se veut une expérience qui se vit, et que l'on doit ressentir. Rien de plus que ce season final spectaculaire et riche en émotions brutes. De véritables émotions, celles sans nom. Tous les acteurs sont tous plus extraordinaires les uns que les autres. Ils sont comme habités par leurs personnages. On s'accroche à eux pour ne pas les quitter, pour ne pas s'en séparer. Chacun d'entre eux ont pu voir une évolution majeure dans leur vie : Nate qui se rend compte que l'amour n'est pas dans le sexe passionnel, David qui accepte son soi homosexuel, Claire qui devient une adulte responsable, Ruth qui apprend à vivre avec son temps et qui devient une femme libérée et de moins en moins conformiste, et Brenda qui a enfin trouvé son équilibre intérieur. Alan Ball peut être fier de son travail d'orfèvre. Il a su créer un monde parallèle au notre en mettant en exergue tous les problèmes de la société et cette peur universelle et séculaire de la mort. A travers des sentiments finement exploités sans jamais rentrer dans le pathos, le larmoyant ou le glauque, il a su guider et construire un parcours narratif exceptionnel au sein d'une équipe talentueuse (merci à Thomas Newman pour sa musique et la sobriété de son générique). Attendez vous à exploser, à ce que vous fassiez rage avec vous même et votre conscience avec le dernier épisode qui ne laisse personne indifférent tant l'expérience qui nous est offerte est riche. Véritable traumatisme viscéral, les dix dernières minutes sont déstabilisantes au plus haut point, voire insupportables. Insupportables car terriblement et malheureusement vraies. On suit nos amis les Fisher jusqu'au bout, jusqu'à la dernière écriture du générique de fin. On les accompagne dans ce voyage final, dans ce tourbillon de pleurs et de crises de larmes. Avec un tragique évènement dont je ne divulguerais rien, le spectateur est ébranlé par ce qui se passe. Il est choqué par la manière dont cela intervient, et choqué par la manière dont cela est traité, car comme toujours, tout est brillamment écrit, réalisé, interprété... Il serait ridicule de dire qu'un film ou qu'une série, comme ici, puisse changer notre façon de voir ou de percevoir le monde, mais disons le franchement : Six Feet Under change et transforme la vie, notre vie et nous apprend à rire de la Mort comme elle est au finale, peu signifiante ; et qu'on ne trouve pas l'Amour, que c'est lui qui vient nous trouver. Et là où on sera éternellement reconnaissant auprès d'Alan Ball, c'est qu'après le visionnage de cette soixantaine d'épisodes de Six Feet Under, on en ressort heureux, et grandi à tout jamais comme si nous avions appris ce qu'est la Vie. Il ne reste plus qu'à la vivre pleinement, riche de tous ces enseignements, de toutes ces expériences, de toutes ces occasions manquées. Moi je dis : "Chapeau monsieur" ! Et merci pour tout.

1 commentaire:

Hoppipolla a dit…

Wow merci pour cette critique, avec laquelle je suis 100% d'accord! Fan absolue de Six Feet Under (je rêve de remercier Alan Ball de vive voix...Si la perfection existe, il l'a atteinte!), les Fisher me manquent depuis que j'ai vu le dernier épisode en 2006. Je pensais que cela me passerait, mais non! Ils sont réellement comme une deuxième famille. Je pense que c'est la série d'une vie, tout le monde devrait prendre le temps de la regarder... Ceux qui ne l'ont pas vu ne peuvent pas imaginer ce qu'ils loupent!
Bref...! Voici la meilleure vidéo hommage que j'ai pu trouver:
http://www.youtube.com/watch?v=dHEF2YDJZYg